Rencontre avec Ariel Weil, pour "Paris en commun" pour parler Tourisme à Paris.
PARISMARAIS.COM a questionné les personnalités politiques locales de Paris Centre et leur à posé un catalogue de questions émises par différents professionnels du tourisme. Ariel Weill, candidat de la liste "Paris en commun" à laquelle s'est raliée la liste des Verts répond à nos questions.
1 / Questions sur la crise covid - Les dispositifs d’aide gouvernementale n’ont pas beaucoup aidé les acteurs touristiques, sauf les géants comme Air France. Que prévoyez-vous pour aider à tenir le coup sur toute l’année 2020 pour les pme touristiques, auto-entrepreneurs , guides, medias locaux, ceux qui ont tout perdu par l’ absence de touristes… La ville de Berlin a débloqué dès le mois de mars une aide d’urgence de 5000 euros pour 100 000 indépendants. Etes vous prêts à en faire autant ? Pour les restaurateurs très mécontents du harcèlement administratif, va t’on être plus « cool » sur les droits de terrasse et autorisations de tranches horaires ?
Le gouvernement français a mis en place un plan de 18 milliards d’euros d’aide pour l’ensemble du secteur du tourisme, dont notamment un fond de solidarité actif depuis le début de la crise et qui restera ouvert jusqu’à la fin de l’année 2020 pour les entreprises du secteur CHR-Tourisme, événementiel, sport et culture. Ce fond qui s’adresse aux indépendants et entreprises jusqu’à 20 salariés permet de délivrer une aide mensuelle allant jusqu’à 10 000 euros. Par ailleurs les entreprises du secteur pourront continuer à recourir à l’activité partielle jusqu’en septembre 2020.
La Ville de Paris a mis en place une aide exceptionnelle de 200 millions d’euros pour ses acteurs économiques et culturels, bien que la compétence de développement économique relève de la Région Ile de France :
- Pour les entreprises et notamment les commerçants et artisans sont actées :
• une exonération de 6 mois de loyers chez les bailleurs de la ville pour les TPE fermées et les associations. Pour les autres acteurs, une exonération, pouvant aller jusqu’à six mois, sera prévue, en fonction de l’impact de la crise sur leur chiffre d’affaires. Ces exonérations sont estimées à près de 75 M€.
• une exonération de 6 mois de droits et redevances (droits de voirie, terrasse, étalage, redevance de déchets non ménagers, redevances taxis) représentant une exonération 40 M€
• 6 M€ sont débloqués pour aider en investissement pour les commerces, artisans, entreprises culturelles, et jeunes entreprises innovantes
• les acteurs de l'économie sociale et solidaire seront également aidés à hauteur de 4M€
- Pour les acteurs associatifs, et ceci dès le début de la crise, la Ville a décidé d'anticiper l'attribution de subventions prévues pour renforcer la trésorerie des associations. La ville créera également un fonds de soutien doté de 10 millions pour ses associations.
- Concernant le secteur culturel, très durement impacté par la crise sanitaire, la Ville souhaite engager aujourd’hui un plan de soutien historique en direction des artistes et des acteurs culturels, d’un montant de 15 millions d’euros.
Enfin, une enveloppe de 5 M€ a été dédiée au financement d’ un plan de soutien en direction du secteur du tourisme, dont les modalités seront prochainement détaillées par l’adjoint en charge du tourisme.
2 / Paris centre va regrouper 4 arrondissements hyper touristiques. Le tourisme c’est 12% des emplois parisiens, beaucoup plus à Paris centre et dans le Marais en particulier. Comptez-vous accorder à ce secteur un ou plusieurs postes à des experts reconnus pour gérer au mieux cette énorme machine regroupant autant d’institutions, d’hôtels et de petits métiers… jusqu’alors les adjoints au tourisme quand il y en avait à Paris 1234 étaient peu compétents en tourisme… car non professionnels du tourisme.
Je propose la mise en place d’un comité Tourisme avec des experts et des représentants de la profession ainsi que des habitants, afin de travailler à un meilleur équilibre entre tourisme et vie des résidents qui pourrait traiter par exemple du sujets des terrasses, d’Airbnb, des autocars, de la promotion d’un tourisme pédestre qui profite mieux aux commerces (par exemple en créant des circuits sur Paris Centre qui font le lien entre lieu touristique et commerçants du quartier). Dans le 1er arrondissement, par exemple, avec l’ouverture de la Samaritaine et de la fondation Pinault, le comité pourrait proposer aux deux établissements un guide des bonnes adresses du quartier pour faire ses courses de produits de bouche ou pour découvrir des artisans.
3 / Voici 3 ans la Maire de Paris a supprimé 3 points d’accueil sur 5 et fait licencier 9 agents d’accueil à l’OTCP, ce qui a généré beaucoup de mécontentement. N’est il pas temps d’ouvrir ou de réouvrir des Corner touristiques ou points info dans différents endroits stratégiques : gares, places, rues, quais de Seine ? Redonner de la place aux êtres vivants et cesser de financer des starts ups qui ont pour but de remplacer des emplois humains par des applis ?
La Ville de Paris est attachée à réserver le meilleur accueil possible à ses touristes. C’est pour cette raison qu’elle a modernisé son accueil en l’adaptant aux pratiques touristiques actuelles : les touristes se renseignent principalement sur internet depuis leurs mobiles (+ de 16,4 millions de visiteurs sur le site parisinfo.com en 2018) et se rendent moins dans les points d’accueil (seulement 238 000 personnes se sont rendues au point d’accueil principal en 2018).
La ville s’appuie désormais sur ces deux modes d’accueil : un accueil numérique renforcé en moyens humains afin d’informer les touristes via le site internet et les réseaux sociaux Paris je t’aime et l’accueil physique via les deux points d’accueil touristiques de l’OTCP, dont le point d’accueil central qui se trouve au cœur de Paris et du Marais. La Ville de Paris a également mis à disposition des acteurs touristiques d’une dizaine de kiosques dans l’espace public afin d’y proposer des activités touristiques. A ce stade seulement 3 kiosques ont trouvé preneurs, dont 2 sur les Champs Elysées.
4/ La taxe de séjour rapporte 80 millions par an, seulement 5,5 sont attribués à l’office du tourisme… où va le reste ? Le comité régional du tourisme va t il être réformé… y aura-t il une simplification et des regroupements ?
La taxe de séjour est reversée à l’ensemble du budget de la collectivité, car comme vous le savez, le tourisme c’est aussi des espaces verts, des lieux patrimoniaux et culturels, un espace public qu’il convient d’entretenir. Concernant le Comité Régional du Tourisme, il ne nous appartient pas de nous prononcer sur son devenir, celui-ci dépendant de la Région et non de la Ville. Mais la Ville de Paris et l’OTCP ont multiplié les occasions de collaboration avec le CRT, et pour la première fois un plan d’actions B2B commun a été présenté en 2019.
5 /De très nombreux acteurs privés sont insatisfaits de la gestion du tourisme parisien et au sein même de l’OTCP ; nombreux sont ceux qui se plaignent de la présence de multiples décisionnaires. Par ailleurs les acteurs privés indépendants se plaignent de subventions de la Ville de Paris à des associations de bénévoles qui font une concurrence déloyale aux guides indépendants ( Paris Greeters notamment ) de sérieuses réformes et redistribution des cartes sont-elles envisagées ? et comment ?
Concernant la gestion du tourisme parisien, de nombreux progrès ont été faits au cours de la mandature qui s’achève. Pour la 1ère fois, la Ville a écrit un schéma de développement touristique, en concertation avec plus de 600 professionnels du tourisme. Un canal d’échange s’est instauré avec le Comité de la Destination régulièrement réuni en plénière ou en groupe de travail. La ville a été aux côtés des professionnels du tourisme quand il s’est agit de le relancer après les attentats de 2015. Elle a été à leurs côtés pendant et après la crise des gilets jaunes. Elle le sera encore dans la mise en œuvre d’un plan de relance ambitieux post-covid 19.
L’OTCP s’est par ailleurs modernisé. Son équilibre budgétaire a été rétabli. La Ville a encouragé la mise en place d’actions communes avec le comité régional du tourisme - si ce sont de ces doublons-là que vous évoqués. Une meilleure répartition des taches entre ces deux organismes a été également soutenue voire initiée par la ville.
La Ville de Paris a toujours soutenu les guides touristiques indépendants, qui sont partie prenantes du comité de la destination. Ils seront d’ailleurs au cœur du dispositif de relance de la destination post-covid 19. Car les guides sont le sel de l’accueil touristique, veillant au savoir de nos hôtes mais également à leur bien-être et à leur sécurité.
La Ville accorde une subvention à l’association Parisiens d’un jour (Greeters) conformément à sa stratégie tourisme 2022 et sa volonté de faire découvrir Paris sous un autre visage, dans des quartiers moins touristiques. Les greeters, dont l’activité est pleinement bénévole, ne forment pas une concurrence déloyale des guides touristiques. Il ne faut pas les confondre avec les freetours qui eux, sous couvert de gratuité, demandent à la fin de chaque visite de l’argent aux participants. C’est contre ces formes d’ubérisation de la profession de guide que nous préférons lutter, en accompagnant par exemple les guides touristiques à se faire mieux connaitre du grand public.
6 / Airbnb, ses bénéfices et ses nuisances. Pour beaucoup de parisiens petits propriétaires, c’est un revenu complémentaire vital pour continuer de vivre à Paris qui perds 11 000 habitants par an. Tout le monde s’accorde pour lutter contre les multipropriétaires… La question du minimum de durée de location est la clé de la tranquillité pour les copropriétés. Pourquoi ne pas imposer un minimum de location d’un mois comme New York ou de 5 jours comme Amsterdam ? … Ce sont les cours séjours qui perturbent les immeubles et font une concurrence déloyale aux hôtels… Et pourquoi limiter à 2 mois par an pour les milliers de parisiens qui n’ ont plus de travail et dont c’est le seul revenu ? Enfin pourquoi ne pas laisser le droit aux copropriétés de réguler elles même d’interdire ou de fixer la durée minimale ou maximale de location.
La législation concernant Airbnb est fixée au niveau national. Nous sommes bien d’accord avec vous sur la nécessité de laisser aux villes la possibilité de mieux réguler ce type de location. Nous en avons fait la demande au gouvernement, et avons soutenu en ce sens des amendements lors du projet de Loi engagement et proximité. La République en marche, et notamment son candidat de Paris Centre, Pacôme Rupin, s’y sont opposés. Nous remonterons au créneau, en proposant aux Parisiens un référendum sur la durée maximale du nombre de nuitées sur la plateforme. Notre objectif est que seule la location touristique meublée non-professionnelle puisse subsister à Paris, car elle seule ne se fait pas aux dépens du logement des parisiens.
7 / Le surtourisme déplait aux parisiens… un exemple : le dimanche après-midi la rue des Francs-Bourgeois est devenu un enfer pour les résidents… Quelles solutions pour que les habitants et le tourisme de masse puissent cohabiter… Que pensez-vous de zones calmes avec des rues dédiées aux résidents , non commerçantes… avez-vous d’autres idées, d’autres projets ?
Le risque de surtourisme est un sujet qui a été pris très au sérieux dès la rédaction du schéma de développement touristique Paris 2022. Si nos analyses et enquêtes montrent que les parisiens souhaitent majoritairement le développement du tourisme, nous savons qu’il est important d’en limiter les impacts négatifs. Nous travaillons à la désaturation des principaux sites touristiques, et notamment dans le centre, en développant et valorisant l’offre touristique au delà, dans les arrondissements périphériques mais aussi de la métropole. Nous pensons également qu’il nous faut limiter le tourisme en gros groupes, ainsi que les cars touristiques. Nous favorisons la venue de touristes individuels, qui se fondent « dans la masse » plutôt qu’un tourisme de masse.
Concernant les résidents, nous souhaitons qu’ils puissent bénéficier de moments « à eux » pour se réapproprier et profiter des sites culturels et touristiques de leur quartier. Nous proposerons ainsi des pass coupes-files aux habitants de Paris Centre pour qu’ils puissent en profiter pleinement.
8 / Quelle est la place des LGBT dans votre programme ? Que diriez-vous de la création d'une vraie institution au service des publics LGBT? Si oui comment voyez-vous le soutien de la puissance publique et de la mairie en particulier à un tel projet ? Question faisant suite au rapport de 2017 de JL Romero sur le tourisme LGBT. Voir la contribution de parismarais.com sur cette question : https://www.parismarais.com/fr/le-marais-blog/tourisme-lgbt-la-mairie-de-paris-se-reveille-t-elle-enfin.html
D’un point de vue touristique, la ville de Paris s’est fortement engagée pour redonner à la destination une image « LGBTQIA+ Friendly ». Vous le savez, l’image de la destination a beaucoup souffert des manifestations contre le mariage pour tous et plus récemment des actes de violence homophobes. Nous travaillons à y remédier sur le fond - et notamment grâce à toutes les actions d’inclusion et de lutte contre les discriminations et violences LGBTQIA+phobes. Et nous y travaillons sur la forme, par des actions de promotion ciblées et un travail avec les professionnels du tourisme LGBTQIA+.
Les Gay Games ont été une formidable occasion de renouer avec la clientèle touristique LGBTQIA+ et de redonner à Paris sa place de destination LGBTQIA+ Friendly. Nous sommes fiers que le Marais ait d’ailleurs été un haut lieu de cet événement mondial ! L’Office du Tourisme et des Congrès de Paris (OTCP) a, dans ce cadre, profondément renouvelé ses outils de promotion (dossier de presse, dossier en ligne, vidéos, etc…) et a mené des campagnes ciblées avec des médias tel que Gay Travel. L’OTCP a, cette même année, adhéré à l’IGLTA (International LGBTQ+ Travel Association) afin de rappeler sa position de destination Friendly mondiale.
En 2019, la ville a mis en place un groupe de travail (Cluster Paris Diversité) pour développer l'attractivité de la destination Paris auprès des clientèles touristiques LGBTQIA+. Ce cluster regroupe une trentaine de professionnels du tourisme et institutionnels (l’OTCP, l’Inter-LGBT, Paris Gay Métropole, le SNEG, Paris Gay Village, des médias, des propriétaires d’établissements, etc…). Ce groupe de travail a produit, à la suite du rapport Roméro, un plan d’action de court et moyen terme pour améliorer l’image LGBTQIA+ friendly de la destination. En accord avec ces recommandations, la ville, l'OTCP et l'ensemble des professionnels s'emploieront notamment à la réassurance des clientèles LGBTQIA+ par une charte d'accueil et de la formation des hôtes ; un meilleur partage des contenus produits par chacun des acteurs (avec notamment un meilleur relais sur les réseaux sociaux de l’OTCP) ; la création de nouveaux outils de promotion, en lien avec les professionnels (dossier de presse, video "Par’is Proud », agenda commun) et des campagnes de communication lors des temps forts de la destination (malheureusement décalées vue les circonstances actuelles).
À Paris Centre, nous oeuvrerons pour la création d'un réseau d’aide aux victimes de discriminations réunissant le Parquet, la police, les services de la Ville de Paris et les associations, la mise à disposition des femmes et des personnes LGBTQIA+ victimes de violences, des appartements du parc social pour l’hébergement d’urgence (rue Agrippa Aubigné et rue d’Aboukir), en lien avec les associations, et nous poursuivrons la célébration des mémoires et des identités des grandes figures de lutte contre les discriminations dans les choix de dénomination des lieux publics. C'est un élément fort du tourisme LGBTQIA+ ! Enfin, comme vous le savez, nous créerons une Maison des Cultures LGBTQIA+ dans le Marais.
9 / les jeux olympiques de 2024. Paris n’a pas demandé leur avis aux parisiens, contrairement aux autres villes candidates… Beaucoup de parisiens sont contre ces JO générateurs de bruit, de pollution, de nuisances et de dépenses pharaoniques. Comment, après la crise actuelle envisager ces JO, pour qu’ils génèrent un tourisme raisonné en respectant les habitants. Un référendum ?
Depuis le lancement de la candidature aux JO et même depuis l’attribution, nous n'’avons cessé de poser la question « quels Jeux voulons-nous ? ». Nous avons lancé une grande consultation nationale sur l’ identité et la forme des Jeux de Paris 2024 en phase de candidature et continuons, avec les Parisiennes et les Parisiens, ce travail de construction du projet pour qu’il soit pleinement conforme aux attentes des habitants et respectueux de leur cadre de vie.
Grâce à cette mobilisation citoyenne nous pouvons nous enorgueillir d’avoir aujourd’hui présenté, avec toutes les parties prenantes, un projet en mesure de fixer de nouveaux standards pour les JOP. Avec 95% de sites déjà existants ou temporaires et un budget de moins de 7Md€, Paris 2024 est une révolution dans le monde de l’olympisme qui tranche avec le gigantisme de certaines éditions précédentes. Paris 2024 seront surtout les premiers Jeux de l’histoire alignés sur les objectifs des accords de Paris sur le climat. Cette ambition répond à la fois à notre ligne politique, résolument écologiste, et à la volonté de tous les parisiens qui ont contribué en exprimant le souhait de Jeux durables et à taille humaine.
Au-delà d’un événement sportif international, ce sera une occasion incroyable de poursuivre la transformation du tourisme à Paris vers un tourisme à impact positif, en accompagnant par exemple les acteurs économiques vers la sortie du plastique à usage unique, la rénovation intégrale du quartier de la Tour Eiffel pour un meilleur équilibre avec ses riverains, et la mise en place de nouveaux parcours touristiques plus durables et respectueux des habitants.